Calais : fin de la démolition des camps et des négociations entre migrants et préfet
29 mai 2014 - La Voix du Nord - Chloé Tisserand et Dominique Salomez
Les CRS ont encerclé ce mercredi matin plusieurs camps de migrants à Calais en vue de leur démantèlement qui s’est achevé vers 13 h. Beaucoup des quelques 550 migrants concernés par cette évacuation avaient déjà quitté les lieux pour se rendre notamment sur le lieu de distribution, rue de Moscou, où des discussions avec les représentants de la préfecture se sont achevés sur un compromis : les migrants sont autorisés à rester dans le lieu de distribution jusqu’à demain voire vendredi matin. Avant de trouver un autre point de chute, « loin du centre-ville », selon les dires du représentant du préfet.
Le préfet du Pas-de-Calais a tenu un point presse ce mardi matin à 8 h, tandis que les forces de l’ordre étaient entrées en action sur les deux camps, une demi-heure plus tôt. Il a indiqué que 200 CRS, gendarmes mobiles et gendarmes de la brigade nautique avaient été mobilisés ce mercredi matin. « Ce qui l’emporte avant tout pour moi, c’est le dispositif sanitaire. Il y a une épidémie de gale qui commence à se développer dans la ville de Calais. Je prends l’engagement qu’il n’y aura pas d’interpellation ou de contrôle de la régularité du séjour des migrants qui entrent dans le dispositif. Pas d’interpellation, sauf en cas de rébellion », a indiqué le préfet, Denis Robin.
Les représentants des différentes nationalités de migrants étaient en pleine discussion vers 10 h 30 pour savoir s’ils acceptaient ou pas la proposition des autorités de quitter le camp et de prendre des bus pour aller prendre une douche et être relogés ailleurs. En échange de la promesse de zéro arrestation.
Pour le dispositif sanitaire, des bus ont été mis à disposition pour faire la navette entre le lieu de distribution des repas, situé face au camp de la rue Lamy, l’un des deux camps démantelés, et la zone Marcel-Doret, où se trouve le lieu de douche géré par le Secours Catholique. C’est là-bas que les réfugiés volontaires ont la possibilité d’être accueillis par quatre médecins de la PASS, un service du centre hospitalier de Calais, et de l’agence régionale de santé. Une vingtaine de bénévoles de la Croix-Rouge et de la Croix-Blanche sont également mobilisés. Cinq cents sacs ont été préparés pour permettre aux migrants de changer leurs vêtements, chaussures, couchage. « Six douches supplémentaires (soit treize au total) ont été installées en plus des sept existantes », souligne le préfet. Vers 14 h, une cinquantaine avaient accepté de s’y rendre, souvent par leurs propres moyens.
Les autres, plus de 200, se sont rendus sur le lieu de distribution des repas vers 9 h en bloquant les accès avec des poubelles pour empêcher les forces de police d’entrer. Plusieurs dizaines de membres des forces de police et de gendarmerie se sont alors postés devant la grille donnant accès au lieu. Ils ont fait face aux bénévoles des associations (Médecins du monde, No Border, etc.). Le directeur départemental de la cohésion sociale, représentant le préfet, a tenté d’expliquer le dispositif sanitaire proposé par l’État et assuré que si les migrants montaient dans les bus, « il n’y aura pas d’interpellation ». Des dispositifs d’hébergement sont prévus pour tous les migrants, a-t-il assuré. Mais ces derniers, qui souhaitent rejoindre l’Angleterre, refusent d’être dispatchés dans des hôtels du département.
Cet échange s’est achevé sur un compromis : migrants et bénévoles associatifs ont la possibilité de rester dans l’enceinte du lieu de distribution jusqu’à jeudi ou vendredi matin, date à laquelle ils devront avoir quitté les lieux pour un « endroit éloigné du centre-ville », selon les mots du directeur départemental de la cohésion sociale. Dans une conférence de presse tenue à 15 h, Denis Robin, a confirmé les termes de cet accord en précisant qu’il faisait « confiance aux associations ». Selon lui, quinze migrants ont accepté des solutions d’hébergement dans le département et deux mineurs rejoindront le dispositif temporaire mis en place à leur intention à Olhain.
Deux camps rasés : le récit de l’évacuation
Vers 7 h, les forces de police étaient arrivées au camp de la Batellerie, dit « des Africains », situé quai de la Gironde. Plusieurs camions de CRS avaient été déployés pour tenter de faire évacuer le camp. Ils se sont heurtés aux No Border, activistes qui défendent les migrants. Ces derniers ont planté des tentes pour bloquer des routes. En réalité, il ne restait que deux migrants dans ce camp. Les autres avaient fui ces derniers jours, voire ce mercredi matin. Nous avons aperçu tôt ce matin de nombreux individus quittant les lieux, couvertures sur le dos. La destruction de ce camp est achevée ; les services de la Ville de Calais ont sécurisé le site.
Un peu plus loin, rue Lamy, au camp dit « des Syriens », beaucoup d’agitation à 7 h 30. Les bénévoles et les journalistes étaient venus nombreux ainsi que des Calaisiens lambdas pour assister au démantèlement annoncé de cet autre camp. Ici aussi, de nombreux migrants avaient quitté le camp par eux-mêmes pour rejoindre « la jungle », un ancien lieu de campement situé zone des Dunes. En fin de matinée, les bulldozers sont entrés en action pour détruire le camp sous le regard de migrants et de passants. Face au cordon de CRS qui encercle la zone en cours de destruction, la tension était palpable. Des migrants qui souhaitaient récupérer leurs affaires dans le camp exprimaient leur colère. Les associations les ont appelés au calme.
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